L'actualité ivoirienne sans coloration politique

La société civile ouest africaine se mobilise contre les accaparements des terres

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Après une première édition où ils ont sillonné les pays sahéliens (Sénégal, Mali et Burkina Faso), la seconde édition de la caravane ouest africaine initiée par la Convergence globale de lutte pour la terre, l’eau et les semences en Afrique de l’ouest a démarré le 10 novembre en Guinée. Autour du thème « droit à la terre, à l’eau et aux semences paysannes, une lutte commune », la caravane sillonnera les pays côtiers, de la Guinée au Bénin en passant par la Côte d’Ivoire, le Ghana et le Togo.

L’étape ivoirienne a abordé les problématiques de l’accaparement des terres et des conflits fonciers et leurs conséquences sur la cohésion sociale ainsi que la question de l’immigration clandestine. Parti de la Guinée le 10 novembre 2018, les caravaniers de cette deuxième édition ont posé leurs valises le 14 novembre à Man (région du Tonkpi), dans l’ouest de la Côte d’Ivoire. Le thème choisi pour cette étape est « la gestion des ressources naturelles et la cohésion sociale ».

Selon les organisateurs, ce thème fait écho à la situation dans la région notamment les conflits fonciers. Massa Koné, porte-parole de la plateforme Convergence, souligne « le foncier étant en relation directe avec les ressources naturelles, c’est pourquoi, nous avons décidé de mettre en rapport ces deux éléments : foncier et cohésion sociale ».

L’objectif est de sensibiliser les populations sur la gestion des ressources naturelles. La pédagogie, explique-t-il, « consiste à dire et à bien faire comprendre à nos paysans que l’eau et la terre sont notre identité. Il faut les protéger. Protéger aussi les communautés, paysans qui en dépendent directement à travers l’agriculture. Il faut également leur faire comprendre les dangers liés à l’utilisation des engrains chimiques, des pesticides, insecticides, sur l’eau, la terre et donc sur leur santé ».

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« Nous prônons par exemple l’agro-écologie. Ce n’est pas un concept nouveau, nos parents l’ont toujours pratiqué peut-être sans qu’on utilise ce terme. Nous disons que c’est une alternative puissante contre toute sorte de pollution », ajoute-t-il.

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Dans le même style mais avec une tonalité beaucoup plus militante, Mamadou Diallo Malhado, représentant la Coalition pour la protection du patrimoine génétique africain (COPAGEN – Guinée) appelle à la vigilance pour faire face aux accaparements de terres : « Si nous arrivons à faire prendre conscience aux populations que la terre est un bien que leur appartient mais qu’elles ne peuvent qu’en user et la transmettre à leurs enfants, nous pensons que la vente de terre et les situations d’accaparement parfois par des grands groupes industriels vont avoir un début de solution. Car même l’Etat qui parfois se couche devant ces grands groupes ne pourra pas ignorer l’engagement des populations ».

Parlant d’accaparement et les conflits fonciers dans la région, Ehouo Christian Médard, le directeur régional de l’agriculture du Tonkpi a rappelé les deux modes de règlement des conflits usités : « la voie de conciliation et la voie judiciaire. Au niveau de la conciliation, il y a les comités villageois de gestion foncière. Ces comités, dans lesquels sont représentés entre autres les chefs de villages, essaient de trouver un règlement amiable. En l’absence d’accord, la requête est transmise à la justice et c’est la voie judiciaire qui est enclenchée ».

« Depuis le début de l’année, ce sont 109 litiges qui n’ont pas trouvé de solution par conciliation qui ont été transmis à la justice. Nous suivons tout cela de près même quand le dossier se trouve au niveau de la justice », assure le directeur régional de l’agriculture du Tonkpi.

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Zrakpa Dopeu Roger, maire de la commune de Zouan-Hounien, a précisé que sa commune ne bénéficie pas des retombées de l’exploitation minière. « Nous ne recevons rien, absolument rien concernant l’exploitation de la mine d’Ity. On nous dit que c’est les villages autour qui sont indemnisés. Mais si vous arrivez à Zouan-Hounien, vous verrez la situation. A cause de cette mine, il n’y a pratiquement plus d’activité économique. Il n’y rien dans les marchés en termes de denrées alimentaires. Et avec tout ça, la mairie ne reçoit rien, aucune part des taxes payées par la société », déplore-t-il.

Pour cette deuxième édition, après Man, la caravane ouest africaine de la Convergence a le mis le cap sur Daloa (région du Haut-Sassandra) avec un accent sur le thème de l’immigration clandestine. L’étape ivoirienne s’est achevée le 19 novembre 2018 à Aboisso (région du Sud-Comoé) où les caravaniers ont aussi évoqué avec les communautés locales la problématique de l’accaparement des terres.

La première édition de la caravane ouest africaine a vu la rédaction d’un livre vert adressé aux autorités de la CEDEAO et le président sénégalais Macky Sall s’est engagé à porter l’initiative auprès de ses pairs. Cette deuxième édition qui s’achèvera au Bénin permettra à la Convergence de remettre ses résolutions au président Patrice Talon qui sera le porte-voix auprès de ses pairs.

Ab Bakhary Traoré, envoyé spécial à Man

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