Le 6ème sommet entre l’Union africaine et l’Union européenne aura lieu les 17 et 18 février 2022 à Bruxelles, en Belgique. Mais dans les rues d’Abidjan, presque personne n’est au courant de cette rencontre qui réunira pourtant plus d’une soixantaine de chefs d’Etats et de gouvernements des deux continents.
Après Abidjan en 2017, c’est Bruxelles, la capitale de l’Europe qui accueille le sommet Union Africaine – Union Européenne de 2022. Une rencontre au sommet entre les dirigeants du « continent de l’avenir » et ceux du « vieux continent ». L’événement est méconnu des abidjanais au point que certains le confondent avec les sommets de la Communauté des Etats d’Afrique de l’Ouest – la CEDEAO. Ils pointent un manque d’information sur l’événement. D’autres donnent même du « on est habitué à ne pas être informé » quand ils ne peuvent parler plus longtemps parce qu’ils n’ont pas le temps de s’arrêter.
« Vous parlez de quoi au juste ? Sommet de la CEDEAO ? »
A l’arrêt de bus 90 près du commissariat du 22ème arrondissement dans la commune de Cocody, au milieu des champs de klaxons, Jean-charles Loua, enseignant dans un collège privé d’Abidjan, attend patiemment son bus express. D’une voix interrogatrice il répond quand l’on essaie de connaitre son avis sur le sommet entre l’Union africaine et l’Union européenne. « Vous parlez de quoi ? sommet de la CEDEAO ? »
La question révèle un manque de communication autour de cet événement auprès de l’opinion en Côte d’Ivoire. Jean-charles Loua n’était pas au courant de l’organisation du sommet. Pas plus que Assah Henriette, gérante d’une entreprise d’import et export pour qui, « les chefs d’Etats africains ne parlent véritablement à leurs concitoyens que lors des campagnes présidentielles et à l’occasion du nouvel an ». Une remarque soutenue par Djehoua Larissa, trentenaire, employé, responsable de communication digitale dans une entreprise qui ajoute, « je pense que c’est un sommet des dirigeants et pour les dirigeants ».
Jean-Charles n’utilise pas les mots de madame Djehoua. Mais le fond de son propos exprime la même chose. « Je ne suis pas au courant. Mais je ne suis pas surpris de ne pas l’être. Même les sommets de la CEDEAO, si ce n’est pas à cause des événements au Mali, on entendait très peu de l’organisation des sommets. Nos dirigeants sont habitués à faire les choses entre eux sans associer leurs peuples », argumente le quarantenaire.
Des défis importants en commun
Pourtant, commence Konaté Nala, responsable d’ONG de défense de droits humains, « en 2017 comme en 2022, ce ne sont pas les sujets brûlants qui manquent : le terrorisme, le réchauffement climatique et ses enjeux environnementaux, les enjeux économiques et la croissance étaient déjà là en 2017 et demeurent d’actualité. La crise sanitaire mondiale liée au coronavirus est venu s’ajouter à la liste ; et de quelle manière ! » s’exclame le militant associatif.
Avant de poursuivre « je suis un observateur attentif. Je m’informe constamment. Mais, je suis tout autant surpris d’apprendre qu’un tel événement se tiendra dans ce mois de février entre africains et européens ». Songeur, il espère que « les dirigeants n’éviteront pas les sujets essentiels comme ceux que j’ai évoqué précédemment ». Surtout à un moment où, constate-t-il « on assiste au retour en force des coups d’Etat dans notre sous-région ouest-africaine ».
Christian Yeboua, membre d’un « réseau d’échange politique » s’inscrit dans la droite ligne des propos de Konaté Nala et observe que « le mode d’accession au pouvoir qu’est le coup d’Etat militaire met en péril les engagements entre les Etats. Il donne pour exemple le Mali en crise diplomatique ouverte avec la France mais aussi avec d’autres pays européens ». Et l’Union européenne avec à la tête la France serait bien inspirée de « ne pas éviter ce type de sujet lors de ce rendez-vous important ».
Traoré Bakary