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Burkina Faso : une crise volontairement négligée

Dans le monde entier, des millions de personnes déplacées endurent des difficultés exceptionnelles, négligées et mises de côté par ceux qui détiennent le pouvoir et les ressources nécessaires pour leur offrir un avenir meilleur. Cette souffrance n’est pas inévitable, comme l’ont montré l’urgence et l’ampleur de la réponse à la guerre en Ukraine.

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Chaque année, le Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC) publie un rapport sur les dix crises de déplacés les plus négligées dans le monde. L’objectif est de mettre l’accent sur le sort des personnes dont les souffrances font rarement la une des journaux internationaux, qui ne reçoivent que peu ou pas d’aide et qui ne sont jamais au centre de l’attention des efforts de la diplomatie internationale.

Pour la première fois, le Burkina Faso est la crise la plus négligée au monde. En raison de l’augmentation de la violence et des déplacés, près d’un Burkinabé sur quatre a besoin d’aide dans le cadre de cette crise de plus en plus grave et négligée.

Le Burkina Faso est l’une des crises les plus jeunes présentées dans ce rapport, mais son déclin a été rapide et dévastateur. Depuis le début du conflit, il y a cinq ans, le nombre de personnes en situation de grave insécurité alimentaire a été multiplié par neuf et plus de 14 000 personnes ont été tuées, dont la moitié depuis janvier 2022. Quelques 2 millions de personnes sont aujourd’hui déplacées à l’intérieur du pays.

En 2022, les besoins humanitaires ont explosé : en décembre, 4,9 millions de personnes avaient besoin d’aide, soit une augmentation de 40 % par rapport au début de l’année. Les attaques de groupes armés non étatiques contre des points d’eau ont coupé l’accès à l’eau pour 830 000 personnes. Le nombre d’écoles fermées pour cause d’insécurité a presque doublé, passant à plus de 6 200, ce qui a perturbé l’éducation de plus d’un million d’enfants. Malgré la gravité des besoins, seuls 42 % des fonds humanitaires demandés ont été versés en 2022, laissant de nombreuses personnes sans aide.

L’instabilité politique a ajouté une couche supplémentaire à la crise, avec deux prises de pouvoir militaires à huit mois d’intervalle. Le premier, en janvier, a déposé le président démocratiquement élu, tandis que le second a opposé deux camps militaires. Bien que les deux coups d’État se soient déroulés rapidement et avec un faible niveau de violence, l’action humanitaire fondée sur des principes a été mise à rude épreuve, et l’année s’est achevée par la déclaration de persona non grata du plus haut responsable de l’action humanitaire des Nations unies dans le pays.

L’accès des humanitaires aux personnes dans le besoin est devenu de plus en plus précaire et le restera en 2023. Environ 40 % du pays est considéré comme échappant au contrôle de l’État, ce qui rend les opérations d’aide dans ces zones extrêmement difficiles. Quelque 23 villes, où vivent 800 000 personnes, sont bloquées par une série de groupes armés, ce qui coupe la population du reste du pays et l’empêche d’accéder aux marchés et aux services sociaux de base. Les ONG et les agences des Nations unies se sont appuyées sur un pont aérien de l’ONU pour atteindre ces populations, mais le fret est limité et ne répond pas à leurs besoins. Dans la ville de Djibo, où vivent près de la moitié des personnes assiégées, l’insécurité alimentaire est devenue si grave à la fin de l’année 2022 que jusqu’à 85 % des repas des familles étaient composés de feuilles sauvages.

La couverture médiatique internationale de la crise est restée limitée et s’est principalement concentrée sur les bouleversements politiques et les attaques les plus médiatisées. L’ampleur de la crise humanitaire est trop souvent restée au second plan, notamment en raison de l’accès quasi impossible des journalistes aux zones de conflit et de déplacés. L’espace humanitaire s’est déjà rétréci en 2023. Une nouvelle interdiction des transferts d’argent mise en œuvre dans les régions du Sahel et du Centre-Nord – deux des régions les plus touchées – prive environ 2 millions de personnes de l’aide en espèces dont elles ont tant besoin. Les négociations en cours pour ouvrir des couloirs humanitaires sont pour l’instant dans l’impasse, mais restent essentielles pour acheminer des quantités plus importantes d’aide vitale, car plus de 3,3 millions de personnes devraient souffrir de la faim cette année.

Source : Conseil norvégien pour les réfugiés (NRC)

Le titre est de la rédaction

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