Zika : faut-il avoir peur d’un virus déjà présent en Afrique ?
Après la maladie à virus Ebola, le monde doit de nouveau faire face à une nouvelle urgence sanitaire de portée mondiale : il s’agit cette fois ci du virus Zika, un virus qui touche l’Amérique du sud mais qui n’est pas aussi étranger au continent africain.
Zika est un virus de la famille des arboviroses, une catégorie de virus transmis par des arthropodes. Pour le cas précis de ce virus, il est transmis par un moustique du genre Aèdes. La maladie que le virus provoque est de la même famille que la Dengue et la fièvre jaune, deux maladies bien connues en Afrique. Comme la Dengue et la fièvre jaune, Zika circule au milieu des populations de singes et l’homme peut être infecté au contact de moustiques porteurs du virus dans la brousse ou même en zone urbaine. Une fois présent chez l’homme, la transmission peut alors devenir interhumaine et c’est aujourd’hui ce qui se passe en Amérique latine et dans les Caraïbes.
Il est important d’indiquer que Zika n’est pas une infection nouvelle bien qu’elle soit émergeante en Amérique du Sud. Le virus a été détecté pour la première fois en 1947 sur une population de singes qui servaient à surveiller la fièvre jaune. C’est dans la forêt de Zika non loin d’Entebbe en Ouganda que le virus a été isolé pour la première fois. Zika est donc présent dans les forêts et les savanes humides de l’Afrique depuis 1947 ! En 1952 il est isolé cette fois ci chez l’homme dans plusieurs pays dont le Nigéria, l’Ouganda et l’Inde. Depuis les années 50, la communauté scientifique a donc clairement démontré l’existence du virus en Afrique et en Asie. Entre 1951 et 1981, Zika a été mis en évidence par des sérologies positives chez l’homme (trace de contact chez des hommes infectés) dans plusieurs autres pays africains. Nous citerons entre autres la Tanzanie, la Centrafrique, la Sierra Leone, le Gabon et le Sénégal. En Asie, au-delà de l’Inde, Zika a été isolé en Malaisie, aux Philippines, en Thaïlande, au Viet Nam et en Indonésie.
Une maladie asymptomatique
Zika qui reste avant tout une maladie vectorielle est transmise par un moustique (Aèdes aegypti) qui se développe au contact de l’homme dans les zones tropicales dans les mêmes conditions que l’anophèle vecteur du paludisme. Cependant il est important de souligner que l’anophèle ne transmet pas le virus Zika. Il s’agit de deux moustiques très différents ! Contrairement donc au paludisme dont les symptômes sont bien connus, on estime que 80% des cas humains infectés par Zika ne présentent absolument aucun symptôme.
« Pour les 20% de cas restant, la maladie se signale par la fièvre, des céphalées, des éruptions cutanées, des œdèmes et de la conjonctivite. Il s’agit donc de symptômes peu spécifiques qui peuvent pousser au diagnostic, à penser à n’importe quelle maladie virale comme la grippe ou Chikungunya » indique Thierry Baldet entomologiste médical, spécialiste des maladies vectorielles au CRDI (Centre de recherche pour le développement international du Canada).
Dans un passé récent, certains scientifiques ont bien cru que cette maladie était très peu pathogène chez l’homme. Cependant lors de l’importante épidémie de Zika en Micronésie au cours de l’année 2007, puis dans le reste de l’Océanie et en Polynésie en 2013-2014, les scientifiques ont commencé à observer des syndromes neurologiques de type Guillain Barré. La nouvelle épidémie qui s’est signalée en Mai 2015 au Brésil vient en quelque sorte confirmer ces premières évidences. Des microcéphalies ont été signalées chez des nouveaux nés dont les mères ont été infectées par Zika au cours de leurs grossesses. Rien qu’au Brésil, plus de 4000 enfants atteints de microcéphalies ont été enregistrés !
« En dehors des nouveaux nés et des quelques cas de syndromes neurologiques observés, Zika a très peu de conséquences sur les autres sujets (les adultes) mais la communauté scientifique reste en alerte car un travail de recherche mérite d’être entrepris pour mieux comprendre ce virus » tient à souligner Thierry Baldet.
C’est l’une des raisons pour lesquelles aucun remède ou même de vaccin n’existe pour neutraliser le virus. Les seules stratégies de protection sont du domaine de la prévention. Se protéger des piqures de moustiques, détruire les gîtes larvaires, procéder à des opérations de démoustication…sont entre autres quelques moyens de lutte.
Une maladie sexuellement transmissible ?
La transmission du virus Zika est essentiellement vectorielle et même si l’idée d’une transmission sexuelle tend à inquiéter les pays déjà touchés, seuls deux cas ont été documentés par le passé. Le premier cas est celui d’un scientifique américain qui a infecté son épouse de retour au Colorado (USA) après un séjour au Sénégal en 2007. Le deuxième cas connu a été de nouveau signalé aux USA (Etat du Texas) avec un homme qui est revenu infecté d’Amérique latine et qui a transmis le virus à son partenaire. Il s’agit donc d’une transmission marginale et plutôt anecdotique par rapport à la transmission vectorielle. Notons qu’à ce jour, 25 pays sont touchés par le virus Zika en Amérique latine et dans les Caraïbes. Le Brésil enregistre le plus grand nombre de cas jamais recensé depuis la découverte du virus. Entre 440.000 à 1,5 million de cas ont été enregistré depuis le début de la flambée jusqu’en janvier 2016 selon l’OMS.
En ce qui concerne l’Afrique de l’ouest, le Cap Vert continue de faire l’actualité. Un suivi épidémiologie de la maladie est fait par l’OMS et le ministère Cap verdien de la santé. Parmi les 7490 cas suspects d’infection à virus Zika signalés du 21 octobre 2015 au 6 mars 2016, 165 concernent des femmes enceintes, dont 44 ont déjà accouché sans présenter de complications ou d’anomalies. Du 29 février au 6 mars 2016, 33 cas suspects ont été enregistrés dans deux des neuf îles de l’archipel. Il s’agit de l’île de Santiago et la municipalité de São Filipe (île de Fogo). Le virus Zika n’a pas circulé dans les îles de Sal, São Vicente, Santo Antão, São Nicolau et Brava. En outre, aucun cas n’a été signalé dans les îles de Boa Vista et Maio depuis la mi-février. Notons que le virus Ziak a été isolé chez l’homme chez 5 dernières années dans quatre (4) pays d’Afrique de l’ouest que sont le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Burkina Faso et le Nigéria.
SUY Kahofi