Claire Dubois et Julien Moreau, ces espions français créés par intelligence artificielle pour attiser le ressentiment anti-français au Burkina Faso
Différentes vidéos publiées sur les réseaux sociaux indiquent que des espions français du nom de Claire Dubois et Julien Moreau ont été démasqués et arrêtés au Burkina Faso. Leurs histoires respectives visent à montrer que la France et ses alliées comme la Côte d’Ivoire et le Bénin œuvrent à déstabiliser les pays membres de l’Alliance des Etats du Sahel (AES). Ces deux espions sont en réalité deux individus fictifs créés grâce à l’intelligence artificielle.
Les vidéos de de Claire Dubois et Julien Moreau circulent sur internet notamment sur Facebook, TikTok et YouTube. Le texte qui accompagne chacune des vidéos est le même et est généré par ordinateur.
L’histoire est toujours celles de deux personnes venues comme des amis du Burkina Faso mais qui sont en réalité des espions français. Les deux vidéos que nous avons identifiés sur TikTok pour Julien Moreau et sur YouTube pour Claire Dubois visent à relancer un narratif souvent relayé par la junte au pouvoir au Burkina Faso. Il s’agit de celui présentant la France et la Côte d’Ivoire comme les pays qui ont coalisé pour renverser Ibrahim Traoré, l’actuel président du Burkina Faso.
Dans le narratif qui accompagne la vidéo de Julien Moreau il est indiqué que « le président Traoré a invité l’homme à une réunion à Ouagadougou, il envoyait des messages secrets la nuit à Abidjan, à une personne qui travaillait pour l’armée française ».
Afin de vérifier si des espions français ont été arrêtés au Burkina Faso récemment, nous effectuons une recherche par mot-clé avec les groupes de mots « espions français arrêtés au Burkina Faso » puis « ressortissants français arrêtés au Burkina Faso« . Aucun média crédible n’évoque une telle arrestation.
La dernière affaire d’accusation d’espionnage porte sur quatre fonctionnaires français arrêtés en 2023 au Burkina Faso. Ils ont été libérés le jeudi 19 décembre 2024 grâce à une médiation du Roi du Maroc. Les faits ne se sont donc pas produits en 2025.
L’analyse des différentes vidéos nous permets de détecter différentes des erreurs. La personne présentée comme Claire Dubois change de visage d’une vidéo (vidéo 1) à une autre (vidéo 2).
Il en est de même pour le président du Burkina Faso sur chacune de ces deux vidéos.
L’espion Julien Moreau supposé être français porte un uniforme où il est marqué US Army avec une écriture illisible sur la partie de son uniforme où est censée figurer son nom.
En ce qui concerne le texte de la vidéo accusant la France et les deux espions, il est disponible sur le site Pravda, un média pro-russe. Une recherche par fragment de texte via Google Search nous a permis de retrouver cet article.
Des espions créés par IA
Les vidéos qui circulent au sujet des deux présumés espions sont composés d’une image accompagnée d’un audio. Les défauts observés sur les différentes vidéos sont celles qu’on retrouve couramment dans les images ou vidéo générées par IA.
Nous avons réalisé une capture d’écran des différentes vidéos. Les outils de détection Undetectable AI et DeCopy AI sont ceux que nous avons utilisé pour la vérification. Ces deux outils précisent que les images ont été générées par une IA avec un pourcentage élevé.
Les accusations portant sur la présence d’espions français sur le territoire burkinabé font parti d’une politique visant à rendre la France et ses partenaires dans la sous-région ouest-africaine responsables du chaos au Burkina Faso. C’est le cas de la Côte d’Ivoire accusée à plusieurs reprises d’être la base arrière des militaires et hommes politiques exilés qui tentent de reprendre le pouvoir au Burkina Faso.
Selon le narratif mainte fois vendu en ligne, Abidjan serait « un centre d’opérations pour déstabiliser » la junte burkinabé. Des accusations portées par Ibrahim Traoré lui-même le 11 juillet 2024, puis par son gouvernement le 23 septembre 2024 et plus proche de nous le 21 avril 2025 où le gouvernement burkinabé a de nouveau assuré avoir déjoué « un grand complot dont les cerveaux de l’opération seraient localisés en Côte d’Ivoire ».
Traoré Bakary
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