Ce 8 mars 2018 le monde célèbre la journée internationale de la femme. Si la Côte d’Ivoire met l’accent sur l’« inclusion financière pour l’autonomisation de la femme et de la jeune fille en milieu rural », Eburnietoday fait la part belle aux femmes qui évoluent dans le numérique, ce secteur qui pendant longtemps semblait être réservé aux hommes.
Le monde est à l’ère des nouvelles technologies de la communication et de l’information. Celui-ci est marqué par un processus de numérisation visible dans tous les domaines d’activité. Le passage au numérique consiste à « reproduire techniquement les valeurs d’un phénomène physique non plus sur le mode analogique », mais en « convertissant toutes les informations qui le constituent en données chiffrables ». Le numérique, une avancée rendu possible grâce à des moyens mécaniques et des technologies innovantes. La Cote d’Ivoire n’est pas en reste de ce processus.
Le pays est classé est 9ème/46 pays africains (2ème derrière le Ghana en Afrique de l’Ouest) et 131ème/176 au plan mondial au niveau de la maturité numérique (Alliance for Affordable Internet report 2017). Dans ce vent du numérique qui souffle sur la Côte d’Ivoire, des femmes essaient de se frayer un chemin. Eburbnietoday les classe en deux principales catégories. Celles qui se focalisent uniquement sur la production de contenu en ligne et celles qui évoluent dans le domaine technologique. Les femmes de cette deuxième catégorie s’activent autour des machines et du code.
« Le numérique est mon autre bureau. Étant Community Manager, je fais la veille sur des publications et des pages… C’est une plateforme pour la promotion de mes articles de blog. C’est un monde de contacts, de réseaux, d’informations, de formation également » affirme Rita Droh, journaliste, blogueuse à droville son blog.
Notre première interlocutrice est la trésorière de l’Union nationale des blogueurs de Côte d’Ivoire (UNBCI), l’une des deux associations de blogueurs du pays. L’internet, elle l’utilise au moins 8 heures par jour. Grâce à internet et les réseaux sociaux, elle arrive à faire des actions sociales. Pour mémoire, elle a lancé début 2018 une campagne de levée de fonds autour du hashtag #UntricyclePourZadi.
Pour suivre Rita Dro : https://web.facebook.com/deamonritadro
Cette opération elle lui a permis de récolter les fonds nécessaires pour l’achat d’un tricycle à Zady, un jeune tétraplégique, qui préfère ramasser les ordures ménagères dans son quartier au lieu de mendier. Elle parcourt également la cote d’ivoire où elle ramène de beaux clichés. « Je souhaite également à travers mes photos du paysage ivoirien faire la promotion du made in Côte d’Ivoire » ajoute-t-elle. Rita Dro fait partie de la première catégorie qui exerce uniquement dans le numérique dans son volet contenu (texte, image, vidéo…). L’internet, est leur domaine de prédilection et elles allient passion et professionnalisme en maniant des outils comme les smartphones, les tablettes et les ordinateurs.
« Le numérique est pour moi un outil d’abord professionnel avant d’être ludique. Les réseaux sociaux par exemple me permettent de donner de la visibilité à mon entreprise, à mes initiatives et à mes articles. C’est aussi un moyen privilégié par lequel on me contacte pour des collaborations. C’est un outil de valorisation de mon savoir-faire. Je suis donc très souvent connectée même si je ne suis pas toujours disponible » explique à son tour Rosine Kacou connu plutôt sous le Nom de Yehni Djidji.
Cette jeune dame qui découvre le blogging en 2008, en fait quelques années plus tard un moyen de partager ses histoires qu’elle écrivait auparavant sur le plus vieux des supports après la pierre : le papier !
Cependant cette passion prend une autre tournure lorsqu’elle remporte le prix de la meilleure blogueuse de Cote d’Ivoire où « des portes s’ouvrent dans le domaine professionnel » précise-t-elle. Des marques s’intéressent à elle pour des partenariats. Elle est par ailleurs présidente de l’Association des blogueurs de Côte d’ivoire (ABCI). Scénariste et écrivain, Rosine Kacou épse Ano est Fondatrice d’une Agence littéraire « Livresque ».
Pour suivre Yehni Djidji : https://web.facebook.com/yehnid
D’un autre côté il y a le monde de celles qui produisent du contenu et de l’autre ces filles qui sont plus dans la Technologie. Ces ‘femen geek’ mènent leur révolution dans la programmation informatique (développement de logiciels) et les machines. Dans ce domaine, Raïssa Banhoro se présente comme l’une des meilleures de sa génération. Codeuse de renom, elle est la ‘mère’ de plusieurs applications dont la plus célèbre est Lucie.
Pour suivre Raïssa Banhoro : https://web.facebook.com/raissa.armelle.1
« Lucie est une application d’alphabétisation fonctionnelle interactive. Elle est dotée d’un assistant vocal qui vous guide tout au long de votre apprentissage et la reconnaissance de l’écriture. Elle se décline en trois niveaux. Le niveau initiation, niveau intermédiaire et le niveau avancé ».
Lucie a donc pour but d’apprendre aux personnes ne sachant ni lire ni écrire d’apprendre à le faire tout seule via une tablette ou un smartphone. Avec cette application, elle a remporté le premier prix de la seconde édition du concours « Rfi challenge app Afrique » en 2017.
Edwige Gbogou est également codeuse et Community manager dans une agence digitale. C’est en 2014 que le virus du numérique s’empare d’elle avec la découverte des FAB LAB mais surtout avec sa rencontre avec Modeste Lalie et Cyriac Gbogou des informaticiens bien connus sur la scène nationale.
Pour suivre Edwige Gbogou : https://web.facebook.com/edwige.gbogou
Edwige a gravi les échelons depuis ses premiers pas dans l’univers du numérique. Avec un groupe d’amis, elle a créé le Baby LAB dont elle est vice-présidente. Elle y partage sa passion pour le numérique avec les jeunes de son quartier : Abobo. Son souhait le plus ardent c’est qu’un nombre plus important de jeunes filles puissent s’intéresser aux métiers du numérique.
« J’encourage aussi les filles à apprendre le code, l’informatique, c’est la base pour demain !»
Elle a eu l’ingénieuse idée de créer sa marque de bijoux avec du matériel informatique recyclé notamment des touches de claviers. Elle allie donc numérique et business.
Les efforts du gouvernement ivoirien
Selon le classement de l’indice de l’égalité des genres établies par l’ONU, la cote d’ivoire occupe la 171ème place sur 188 pays. Quant au World economic forum, il classe le pays a la 136ème place sur 144 pays pour le même indice. La Côte d’Ivoire reste un des pays au monde où les inégalités entre les hommes et les femmes sont les plus flagrantes. Peut-être bien que le numérique pourrait aider à réduire ces inégalités puisque la Côte d’Ivoire veut se positionner comme un hub du numérique en Afrique. Elle accueille de plus en plus d’évènements liés au numérique. La dernière en date est l’ADICOM Days qui a eu lieu les 2 et 3 Mars dernier à Abidjan.
Depuis quelques temps plusieurs initiatives sont prises afin d’encourager les filles à s’intéresser à l’informatique et au numérique. En novembre 2017, il y a eu la première édition du FENUD « femme, numérique et développement », à Abidjan. Son initiatrice Christelle Assirou a affirmé que « pour ne pas rater le rendez-vous de la combinaison révolution numérique et développement, il ne faut pas manquer de conjuguer la dimension du genre avec les TIC ». Le Ministre Bruno Koné n’a pas manqué de préciser à cette occasion que tous les moyens sont mis en place pour que le tiers des étudiants de l’ESATIC soient des femmes.
En avril 2016, le ministre Bruno Koné avait mentionné lors de la célébration de la journée internationale des jeunes filles dans les TIC avec l’ONG « Femmes et TIC » qu’« il nous faut donc étendre le vivier des compétences technologiques en y intégrant davantage de femmes qualifiées dans le domaine du Numérique. Pour cela, il faut investir dès à présent dans la formation des jeunes filles et des jeunes femmes aux Tic et aux métiers du Numérique ».
Femme facteur d’émergence
Le sixième rapport économique de la Banque mondiale consacré à la situation économique ivoirienne publié en janvier 2018 et intitulé « Aux portes du paradis : comment la Côte d’Ivoire peut rattraper son retard technologique » en plus de reconnaître la performance de l’économie en Côte d’Ivoire recommande « des mesures urgentes pour se moderniser et rattraper son retard technologique ».
Ce rapport indique clairement que « pour réussir et maintenir sa bonne trajectoire de croissance, l’économie ivoirienne doit s’ouvrir davantage à l’extérieur tout en élargissant les compétences de sa main-d’œuvre et en augmentant la connectivité, afin de mener une stratégie de rattrapage technologique réussie » précisant que « la théorie économique a démontré depuis longtemps le rôle clé des nouvelles technologies dans le processus de développement d’un pays ».
Bien avant, cette institution avait publié un rapport de 68 pages en juillet 2017 sur la Côte d’Ivoire qui s’intitule « Et si l’émergence était une femme ? ». Ce rapport mentionnait qu’« une politique basée sur l’équité des genres pourrait aider la Côte d’Ivoire à atteindre l’émergence ». Pour ce début d’année 2018, la Côte d’Ivoire enregistre 17 millions d’abonnés à l’internet contre 10 millions début 2017. Selon les autorités ivoiriennes le pays est classé 5ème en Afrique et 18ème dans le monde montrant clairement que l’économie numérique joue un rôle de plus en plus important dans le développement de la Côte d’Ivoire.
Femme-numérique-émergence : les femmes dans le numérique pourraient-elles être un véritablement facteur pour l’émergence ? Espérons que d’ici 2020 les politiques de développement socio-économiques et de promotion de la femme puissent les amener à mieux contribuer à la croissance numérique du pays.
Raïssa Yao
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