Le mobile money est en train d’écrire la nouvelle histoire de la bancarisation pour tous en Afrique et la Côte d’Ivoire n’est pas une exception. En l’espace de 5 ans, le téléphone portable semble être l’outil le plus solliciter par les ivoiriens pour envoyer et recevoir de l’argent.
Le mobile money peut être simplement défini comme étant toute opération ou transaction financière faisant intervenir le téléphone portable comme terminal d’émission ou de retrait d’argent. A cela s’ajoute le règlement de facture ou l’achat de bien depuis le comptoir d’une administration publique, le guichet d’un service d’assurance ou la caisse d’un supermarché. En Côte d’Ivoire, ce moyen de paiement s’est fortement démocratisé ces dernières années au point où les opérateurs de téléphonie mobile y ont investi d’importantes ressources pour améliorer sans cesse la qualité du service et vanter les avantages de leurs offres à coup de publicité. Et les résultats de cette offensive au niveau du mobile money sont bien visibles.
Selon l’Autorité de régulation des télécommunications de Côte d’Ivoire (ARTCI), les transactions quotidiennes via mobile money s’élèvent à 11 milliards de f CFA dans un pays dont le taux de pénétration du téléphone mobile est estimé à 110%. Sur les 27 millions d’abonnés au téléphone portable que compte la Côte d’Ivoire, 8,5 millions disposent d’un compte mobile money logé chez l’un des trois (3) opérateurs encore en lice après la réforme du secteur. Il s’agit de MTN avec MTN mobile money, Moov avec Flooz et Orange avec Orange money. La valeur globale des transactions mobile money en 2017 s’élève à un peu plus de 4.000 milliards de f CFA. Ces chiffres témoignent du succès du mobile money à la sauce ivoirienne. Et pour toucher de près ce succès, il faut bien entendu se plonger dans l’univers des consommateurs qui sont les mieux placé pour en parler.
Un succès lié à la simplicité
Notre périple au cœur de la capitale économique ivoirienne commence dans le quartier de Cocody Riviera 2. A chaque coin de rue, on peut aisément voir des points mobile money qui de plus en plus proposent d’autres services comme la vente de cartes bancaires prépayés. Sans trahir son chiffre d’affaire quotidien, Koné Oumar gérant d’un espace mobile money indique qu’il enregistre chaque jour au bas mot « entre cinquante et cent clients pour différentes opérations ». Il s’agit principalement « d’envoie et de retrait d’argent dont les montants varient entre 5.000 et 250.000 f CFA voir plus ».
« Il nous arrive de transférer quelques rares fois des montants compris entre 500.000 et 1 millions f CFA » nous indique Koné Oumar.
Ces montants élevés sont généralement effectués par des artisans ou des commerçants qui ont urgemment besoin de liquidité pour faire face à des commandes urgentes. A la question de savoir s’il existe certaines personnes capables d’avoir plus d’un million de francs sur un compte mobile money ; c’est un client venu retirer de l’argent qui nous donne un élément de réponse plutôt surprenant.
« C’est possible que certaines personnes puissent avoir autant d’argent sur le compte mobile money. Et si elles gardent de telles sommes sur leurs comptes, c’est parce qu’elles en n’ont marre des banques ! Ici au moins vous avez facilement et rapidement votre argent » souligne Ernest Koffi cadre dans le domaine des assurances.
La simplicité du service et la disponibilité des avoirs semblent être les deux critères qui attirent les consommateurs vers le mobile money. « Il n’y a pas de plafond ou de plancher de retrait » souligne Casimir Kouassi étudiant qui précise que seule l’absence de liquidité suffisante dans les caisses d’un point mobile money peut être un frein à votre transaction. Hortense Kakou, commerçante de produits cosmétiques dans la commune de Treichville reste convaincu qu’en dehors des intérêts que rapportent les comptes bancaires, elle ne voit vraiment plus de différence entre les comptes dans les institutions financières et le mobile money. Au-delà, la jeune dame semble avoir une dent contre les banques.
« Aujourd’hui certaines banques vous imposent des montants pour tous vos retraits. Pas moins de 100.000 f CFA à certains guichets et jusqu’à 300.000 pour d’autres. Il faut avoir la carte magnétique pour les retraits plus petits. Lorsque vous n’avez pas la carte, vos sous restent bloqués chez eux » détaille notre interlocutrice.
La jeune commerçante indique qu’à plusieurs reprises elle a dû reporter des achats à cause « des contraintes imposées par les banques ». Aujourd’hui grâce au mobile money « vous avez votre argent quand vous voulez » et surtout « sans perdre des heures dans les agences des banques » se réjouit Hortense Kakou. Le mobile money est certes un service rapide et accessible mais il semble avoir bâti également son succès sur les failles des banques en ce qui concerne la qualité de leurs services. Ces failles sont connues de tous. Il s’agit entre autres de la lenteur dans les prestations, le manque de civilité et de courtoisie aux guichets, les prélèvements souvent inexpliqués et les planchers imposés pour les retraits surtout aux petits épargnants.
Le succès du mobile money ne peut cacher une autre réalité. Ce service qui a le vent en poupe reste aussi fragile au niveau de la sécurité. De nombreux consommateurs se plaignent d’avoir été victimes d’arnaques sur leurs comptes. « Les arnaques des petits brouteurs sont possibles lorsque le client lui-même cède à la tentation des bonus et autres concours imaginaires organisés par Orange ou MTN. Cependant, il faut noter que certains de ces vols sont tellement bien élaborés et très techniques que souvent je me dis qu’il y a forcément des complicités en interne » affirme convaincu Bakayoko Souleymane chef des opérations pour une compagnie de sécurité.
Le succès du mobile money semble attirer non pas seulement des consommateurs désireux de profiter pleinement d’un service qui leur facilite la vie. Il attire aussi des hommes de mauvaise foi qui ne pensent qu’à racler les comptes des imprudents. C’est la raison pour laquelle à chaque transaction, des messages invitant les consommateurs à la prudence sont envoyés par les opérateurs de téléphonie mobile. Une mise en garde pour éviter de se faire siphonner ses avoirs.
SUY Kahofi
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