L’argent sale aux portes des universités !
La conférence publique sur l’impact du blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme sur les économies ouest-africaines s’est tenue ce 22 Mai 2017 à l’hôtel Belle Côte. Une occasion pour les experts de montrer que le monde universitaire est aussi gangrené par ce fléau.
Le blanchiment d’argent reste une problématique économique et sécuritaire d’actualité en Afrique de l’ouest et le directeur général du GIABA n’a pas manquer de le souligner. Adama Coulibaly a notamment fait remarquer que le blanchiment d’argent équivaut à l’aide que la région ouest-africaine attend des institutions internationales.
« C’est dire que c’est une réalité visible, palpable. Il est important que les canaux de blanchiment soient coupés des auteurs de ces actes » a-t-il indiqué.
Pour arriver à atteindre cet objectif, il est important de répertorier les secteurs utilisés par les criminels pour blanchir les fonds. Et l’un de ces secteurs identifié est celui de l’éducation. Alors qu’ils étaient réputés sévir et faire du chiffre dans les activités économiques, les barrons du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme « sont à présent aux portes » des universités. Cette nouvelle approche de ce fléau a été révélé par le Professeur Kotchi Valère, expert en blanchiment d’argent et financement du terrorisme et par ailleurs, enseignant chercheur à l’université Lorougnon Guédé de Daloa.
L’expert a fourni cette information à l’issue de la conférence publique organisée par le Groupe Intergouvernemental d’Action contre le Blanchiment d’Argent en Afrique de l’Ouest (GIABA). Le thème qui a servi de support de réflexion et d’analyse était « Impact du blanchiment des capitaux et du financement du terrorisme (BC/FT) sur les économies ouest-africaines et enjeux de la LBC/FT ».
Selon les explications de Professeur Kotchi Valère, « les universités réunissent toutes les dispositions pour que les criminels se servent d’elles pour intégrer de l’argent sale dans les circuits financiers légaux ». Ces faiblesses sont essentiellement dues à la paupérisation qui dispose les dirigeants des universités à s’ouvrir à toutes sortes de financement pour leur développement. Le fait que ce secteur n’est pas conséquemment réglementé pour contrôler l’origine des sommes investies, de l’argent sale peut entrer dans le développement des universités, a déploré le Professeur Kotchi Valère.
A ce titre, il a préconisé à l’Etat de revoir la réglementation en vigueur pour pallier à cette menace, qui à son analyse peut se permettre avec de l’argent sale de financer des universités entière au profit d’organisations criminelles ou terroristes. Par ailleurs, citant une étude de la Cellule de traitement des informations financières (CENTIF), l’expert universitaire a indiqué que les secteurs agricole et de l’immobilier sont les plus vulnérables au blanchiment d’argent. En ce sens que ces secteurs sont très marqués par des échanges d’argent en espèces, excluant les possibilités de contrôle.
Il a illustré sa démonstration par le fait que lors des achats de produits agricoles bord champ, les échanges se font avec de l’argent en espèce.
« L’Etat a fait beaucoup d’effort mais pas assez » selon notre interlocuteur, qui requiert que les lois en vigueur soient appliquées, mais aussi actualisées selon les nouvelles réalités du phénomène. Il faut également, a-t-il ajouté, qu’il y ait de la sensibilisation. C’est d’ailleurs dans cette dynamique de sensibilisation que le GIABA a organisé cette conférence publique qui sera suivi ce mardi 23 Mai d’un concours inter-universitaire d’Art Oratoire sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT) en Afrique de l’Ouest.
« Nous pensons que la jeunesse qui est le levier le plus dynamique de l’Afrique doit être impliquée, s’approprier les concepts, s’approprier les mécanismes » soutient Adama Coulibaly le directeur général du GIABA
Huit universités de la sous région vont s’affronter en finale. Pour le représentant permanent de la CEDEAO en Côte d’Ivoire, Carlos Boubacar N’Diaye, toutes ses initiatives s’inscrivent « dans l’un des objectifs ultime de la création du GIABA, qui est de doter la région ouest africaine des solutions sécuritaires alternatives à celles militaires. Son action permet d’assurer une meilleure gouvernance économique et financière des états membres par la promotion des mesures de lutte contre la criminalité financière transnationale ».
Selon le GAFI, Groupe d’action financière (organisme international de lutte contre le blanchiment de capitaux), le blanchiment d’argent est une activité illégale qui génère chaque année entre 590 milliards à 1.500 milliards de dollars américains.
Alain Ahimou P.