Manifestation de l’opposition : le film de l’agression des journalistes
Deux journalistes, Daouda Coulibaly et Landry Beugré, ont été arrêtés et violentés par la police lors d’une manifestation de l’opposition devant la Commission électorale indépendante (CEI) ce jeudi 22 mars 2018. Retour sur cette agression.
Dès 8 heures, le journaliste et blogueur Daouda Coulibaly arrive à la Commission électorale indépendante (CEI) au ‘’Carrefour Duncan’’ à Cocody Deux-Plateaux. Il filme avec son téléphone et relaie aussitôt en direct sur page Facebook la manifestation de l’opposition. « La minute d’après, les policiers, offusqués de se voir filmer, commencent à repousser manifestants et journalistes jusqu’à devant la résidence du vice-président Kablan Duncan », explique ce matin Daouda Coulibaly, par ailleurs Secrétaire général de l’Union nationale des blogueurs de Côte d’Ivoire (UNBCI).
Ensuite, l’auteur des ‘’Chroniques de Daouda’’ réalise une interview avec la Secrétaire générale Front populaire ivoirien (FPI) Agnès Monnet, qui a été aussi repoussée par les policiers : « C’est pendant ce moment que le confrère de L’Intelligent d’Abidjan est violemment arrêté ». Il lance aussitôt l’alerte de l’arrestation de Landry Beugré sur les réseaux sociaux. Puis, fais également une interview en direct avec le président FPI Pascal Affi N’Guessan lorsqu’il arrive à la CEI pour déposer sa « résolution » avec ses camarades.
Après cela, Daouda Coulibaly décidé de quitter les lieux. Alors qu’il tente de traverser la voie du côté de ‘’Latrille Event’’ pour regagner la station ‘’Shell’’, un officier l’interpelle en ces termes, selon son récit : « Toi là, tu es bête ou bien ? On ne vous pas dit qu’on ne passe pas ici ! ». Le journaliste fait remarquer au policier que son propos est maladroit. Un crime de lèse-majesté. Daouda Coulibaly est bastonné par une horde de policiers, roué de coups puis interpellé comme le montre la vidéo qui montre cette agression. Pendant cette violente interpellation, il perd son portefeuille qui contenait ces pièces d’identité et la somme d’argent de 40 000 francs Cfa.
Landry Beugré, journaliste au quotidien ‘’L’Intelligent d’Abidjan’’, est remis en liberté à la mi-journée après avoir été retenu au 12ème arrondissement de police de Cocody-Vallon. « On était en train de faire l’interview avec le représentant de Affi. Il y avait du monde. Donc j’étais en train de filmer. Un policier arrive et il dit que je suis en train de les filmer. Il est tombé sur moi en même temps », a-t-il raconté à Eburnie Today, quelques minutes après la déclaration d’Affi N’Guessan à la presse le jeudi 22 mars.
Le commissaire Alliali K., du district de Cocody, intervient vigoureusement. « Toi, on t’a libéré, tu es en train de dire quoi ici ? », s’adresse-t-il au journaliste Landry Beugré sur ton menaçant. Il enchaîne : « Il faut écouter ce qu’il est en train de dire. Tu veux discuter avec le chef ? Moi, je vais te mettre au violon ». L’officier de police arrache mon téléphone avec lequel j’enregistrais et le remet à un de ses agents. Ce dernier m’a ensuite remis mon téléphone.
Relâché peu après 12 heures, Daouda Coulibaly et Fernand Dedeh, vice-président de l’Observatoire de la liberté de la presse, de l’éthique et de la déontologie (OLPED), échangent avec quelques officiers afin de retrouver ce qu’il a perdu lors de son interpellation. Les policiers sont peu coopératifs et inflexibles. Un sous-officier raille même le confrère qui affirme qu’il a été violenté, en ces termes : « c’est ça qu’on appelle bastonner ? C’est quelqu’un qui a été bastonné qui est là ? ».
Daouda Coulibaly n’aura pas gain de cause. Il décide se rend au 12ème arrondissement. Au comptoir, il explique sa mésaventure aux trois policiers présents. Ceux-ci l’orientent vers un autre bureau à l’étage pour sa plainte. « Si tu es trop fâché, va porter plainte devant le procureur de la république », lui répond le capitaine Paul Achi. Les policiers s’étonnent même de sa démarche : « donc tu veux porter plainte contre la police ! », s’exclament-ils. Seul un certificat de perte lui est remis à 12 heures 45 par les policiers.
Après cette « torture physique et psychologique » dont il a été victime jeudi, Daouda Coulibaly a affirmé se sentir mal ce vendredi. Il a décidé de porter plainte.
Anderson Diédri