Après une longue période de léthargie, La Poste de Côte d’Ivoire reprend des couleurs grâce un à ambitieux plan stratégique. Malgré les efforts de la Direction, l’engagement des partenaires et des employés, force est de constater que certaines mains dans l’ombre tentent d’étouffer cette croissance.
Au départ d’une gare routière à Adjamé (Abidjan) pour une petite localité du centre de la Côte d’Ivoire, nous sommes plutôt surpris par une scène qui dans Etat moderne ne devait plus exister. Un coursier venu d’un Ministère interpelle un jeune apprenti sur un ton familier et plein d’humour :
« Fofana, voici un courrier pour le Préfet. Laisse-le à la gare et demande à quelqu’un de le déposer à la préfecture ».
L’apprenti, les doigts couverts de cambouis, se saisi du courrier et le jette à l’avant du véhicule avec d’autres petits colis. Le courrier qu’il vient de jeter sans aucune gêne et à la limite du mépris est destiné au représentant du Chef de l’Etat dans une région !
Nous sommes bien en Côte d’Ivoire, locomotive économique de l’UEMOA et le courrier officiel de la République est encore trimballé par des apprentis dans des gares routières ! Or l’Etat de Côte d’Ivoire depuis son indépendance s’est dotée d’une entité qui a la mission de faciliter l’acheminement du courrier (plis et documents), des colis et autres paquets sur toute l’étendue du territoire. Cette entité c’est La Poste qui au fil des années s’est vu siphonner toutes ses sources de revenus, ses activités et ses prérogatives.
Aujourd’hui en Côte d’Ivoire, des compagnies de transports, des particuliers, des entreprises écrans…distribuent le courrier, proposent des offres de paiement électronique, font de la microfinance de proximité sans verser parfois une seule taxe à l’Etat. Et le comble c’est que certains services de l’administration publique sous-traitent avec ses structures qui visiblement se sucrent sur le dos de l’Etat. On pousse La Poste de Côte d’Ivoire vers le gouffre en pactisant et en laissant opérer d’autres entreprises qui sont loin de participer directement à la croissance économique de la Côte d’Ivoire.
Les exemples qui le montrent sont omniprésent autour nous. Chaque ministère et service publique semble s’être dotée de sa propre structure de distribution de courrier. A bien fouiller, il s’agit de boite montée de toute pièce par des patrons de l’administration qui empochent chaque mois des millions. Cet argent qui revient de droit à La Poste lui file entre les doigts car le courrier d’entreprise à distribution exceptionnelle (CEDEX) qui est une de ses tâches lui a été frauduleusement retirée. Idem pour les envois internationaux de plis, document et colis.
Bien que les tarifs de Post’Express soient largement inférieurs à ceux de la concurrence, l’administration préfère choisir des offres plus onéreuses. Un pli à acheminer vers la France dont le poids est compris entre 0 et 500 g coûte 24.000 f à La Poste : chez DHL Express il est 46.500 f. DHL Express (plus coûteux) est choisi en lieu et place de Post’Express (moins cher). Ce type de pratiques qui consiste à dilapider l’argent du contribuable ne peut que cacher une seule chose : un mécanisme de corruption où forcément une ristourne est reversée à celui qui aura autorisé ce contrat.
Plus loin, le paiement dématérialiser de la scolarité a été cédé à la CELPAID. Un service qui est du ressort de La Poste grâce notamment à son réseau qui reste plus fort que celui de nombreux établissements financiers. Dans certaines localités la CELPAID n’est pas présente : La Poste si ! Alors qui gagne à ne pas transférer ce service à La Poste ?
Depuis les années 70, La Poste par son action était la première banque de Côte d’Ivoire favorisant notamment l’inclusion financière et la bancarisation de proximité grâce à la collecte et la gestion de la petite épargne. La Poste aujourd’hui veut aller plus loin en proposant des offres pour l’épargne, le paiement des salaires, le paiement des bourses, la distribution expresse du courrier en Côte d’Ivoire et ailleurs dans le monde. Mais hélas, chacune de ses initiatives semble être plombé par des individus, des lobbys et des entreprises.
On préfère voir La Poste mourir pour tirer profit des tâches et prérogatives qui sont les tiennes. La Poste renaît après un long sommeil et son plan stratégie est basé sur vision forte : être la maison du citoyen, le coursier de l’Etat et des entreprises. Ce challenge, cette ambition ne sera qu’un vœu pieu sans une volonté politique réelle et un accompagnement du Gouvernement Ivoirien.
L’administration centrale doit redonner en premier à La Poste toute sa force. Le courrier officiel de l’Etat de Côte d’Ivoire (donc de son administration) ne peut être sous-traité avec des particuliers ou le privé. Si l’administration publique, en commençant par les Ministères, mise de nouveau sur La Poste, d’autres clients suivront. Et au final se sont des emplois importants qui seront officiellement crées.
Rien que dans la distribution motorisée du courrier et du colis express se sont des conducteurs et mécaniciens qui seront recrutés, plus d’agents de tri et de gestionnaires de point de retrait qui auront un salaire chaque fin de mois. Au lieu de perdre en taxes et impôts à faire confiance au privé dont les services jusque-là ne génèrent que très peu d’emplois, l’Etat gagnerait à soutenir son propre service postal.
Longtemps critiquée, La Poste est aujourd’hui dans une dynamique de redynamisation avec des services et offres qui dérangent visiblement la concurrence. Mais sans l’appui de l’Etat de Côte d’Ivoire il sera bien difficile à La Poste d’atteindre son objectif d’être au service du citoyen.
SUY Kahofi
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