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Reprise du procès conjoint Laurent Gbagbo-Charles Blé Goudé à la CPI

Ouedraogo Salifou, le 30ème témoin dans l’affaire Laurent Gbagbo-Charles Blé Goudé contre le procureur de la CPI, a été interrogé sur la marche des pro-Ouattara sur la RTI en décembre 2010 et la marche des femmes d’Abobo en mars 2011. Cette audience marque la reprise du procès de l’ex-président ivoirien et son ministre de la jeunesse.

Suspendu le 9 décembre 2016, le procès conjoint de Laurent Gbagbo et de Charles Blé Goudé a repris ce lundi 6 février à la Cour pénale internationale (CPI) à la Haye. C’est Ouedraogo Salifou, un burkinabé né en Côte d’Ivoire, qui était à la barre. L’interrogatoire de ce mécanicien et commerçant a notamment porté sur la marche des pro-Ouattara sur la Radiodiffusion télévision ivoirienne (RTI) à Cocody le 16 décembre 2010.

« On n’a pas pu franchir pour arriver à la RTI », se souvient le témoin.

Habitant la commune d’Attécoubé et travaillant à Abobo, il assure qu’il a passé la nuit chez un ami la veille de cette marche, évoquant des raisons de sécurité. Lorsqu’un des avocats de Monsieur Gbagbo, Me Andreas O’Shea, demande au témoin de donner le nom de ce dernier, un substitut du procureur réclame aussitôt un huis clos partiel pour éviter de divulguer au public son identité.

Le juge-président Cuno Tarfusser n’y trouve aucun inconvénient. Après ce bref huis clos, Me Jean Serge Gbougnon, l’un des avocats de la défense, et conseil de Charles Blé Goudé, estime que cette interruption de l’audience n’est pas nécessaire parce que le nom donné par le témoin est un diminutif qui ne permet en aucun cas d’identifier la personne dont il est question : « donc on n’a pas besoin de passer à un huis clos partiel pour ça ».

Le président de la chambre l’a remercié pour cette précision mais n’a pas manquer de mettre en garde ceux qui étaient présents dans la galerie du public afin de suivre l’audience. Il s’agit en grande partie des partisans du président Laurent Gbagbo qui ont effectué le déplacement pour soutenir l’ancien président ivoirien.

« Je demande au public de ne pas applaudir sinon je vais devoir évacuer la salle », a menacé le juge Tarfusser.

Après la pause, le témoin a été interrogé toute l’après-midi sur la marche des femmes d’Abobo le 3 mars 2011. Ce mécanicien a demandé à plusieurs reprises à Me O’Shea de donner la signification de certaines expressions. Les mots « existence », « survécu », « attribuer » ou encore « instruction » ne figurait pas dans le dictionnaire du témoin.

« Instruction, ça veut dire quoi ? Je veux connaître la signification parce que le français est un peu lourd », dit-il à l’avocat de la défense.

Lorsqu’également le témoin demande à son interlocuteur « l’armée est structurée, ça veut dire quoi ? », Laurent Gbagbo, assis dans la salle d’audience, l’air souriant, murmure quelques mots.

Le jour de cette manifestation des femmes, Ouedraogo Salifou qui déclare s’être rendu à son magasin à Abobo, assure avoir entendu des tirs vers le rond-point du Banco puis ajoute que les gens s’enfuyaient mais lui s’est précipité pour comprendre ce qui se passait. Il s’est particulièrement élevé contre la théorie du complot qui avait été évoquée à l’époque pour qualifier la scène. Il dit avoir vu des femmes mortes lors de cette marche.

« Avec ça, les gens qui étaient là (l’ancien pouvoir, ndlr) ont fait un montage pour dire que les femmes qui sont mortes, c’est du Bissap sur elles… Pourtant, nous, on est allé sur le lieu, on a vu les femmes qui sont mortes, on a pris des pagnes pour les couvrir. Vraiment, c’était très choquant le mot « bissap » qui aurait été versé sur les femmes », clame Ouedraogo Salifou.

L’interrogatoire de ce 30ème témoin dans le procès Gbagbo s’achèvera-t-il ce mardi 7 février ? En tout cas, le juge-président souhaite progresser vite. Cuno Tarfusser veut que dès mercredi un autre témoin soit auditionné durant deux jours, suivi d’un autre vendredi.

« Voilà la façon dont nous souhaitons procéder et je vous demanderais de bien vouloir vous y conformer. Il va falloir être plus strict en matière d’horaire. Il faut être plus strict dans un but de célérité », presse le juge, s’adressant aux avocats de la défense.

« Nous ferons de notre mieux pour nous conformer à ce délai », promet Me O’Shea, qui ajoute qu’il doit consulter son collègue Me Emmanuel Altit. C’est une petite pression pour les conseils de Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé qui vont devoir aller un peu plus rapidement dans leurs interrogatoires tout en ayant à l’esprit de défendre au mieux leurs clients.

Anderson Diédri

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