Sécurité : Hamed Bakayoko déjà sur le fil du rasoir (Analyse)
Hamed Bakayoko, l’ancien locataire du ministère de l’intérieur est passé ministre de la défense lors du remaniement technique du gouvernement le 19 juillet dernier. Il est vraisemblablement la dernière carte d’Alassane Ouattara dans sa lutte contre l’insécurité et les mutineries interminables !
En quasiment six mois, sous la pression d’une descente aux enfers sécuritaire faite de mutineries et autres mouvements d’humeur de soldats, Alassane Ouattara a renouvelé totalement le commandement des forces armées de la Côte d’Ivoire.
Début janvier, sous le feu nourri de la première mutinerie, le Chef de l’Etat très mécontent renouvelle entièrement le commandement des différentes forces ivoiriennes. Le Chef d’Etat-major des armées, le Commandant suprême de la Gendarmerie et le Directeur général de la Police nationale vont tous y passés. A leur place, de nouveaux hommes sont annoncés sans que la situation inquiétante qu’imposent ses mutineries ne s’estompe.
Après un moment d’accalmie, sous les ordres des nouveaux patrons des forces armées nationales, d’autres mutineries vont éclater avec plus de vigueur et de ténacité de la part des mutins. Alassane Ouattara sera obligé de courber l’échine et de juger recevable la requête des 8.400 ex-combattants qui réclament une prime de 18 millions chacun. Au plus fort de cette crise, le ministre auprès du Président de la République chargé de la Défense Alain Donwahi se fera même séquestrer un moment par les mutins. Ce fût le malaise de trop !
Très affaibli dans l’opinion par les frasques de ces soldats, Alassane Ouattara va jouer sa carte maîtresse pour mettre fin à cette insécurité ambiante qui règne sur la Côte d’Ivoire causée essentiellement par les revendications de primes au sein de la grande muette et également d’anciens combattants démobilisés qui ont combattu durant la rébellion de 2002 à 2011. Cette carte maîtresse, c’est son homme de main et de confiance, Hamed Bakayoko, le fidèle parmi les fidèles qui est d’ailleurs le seul ministre d’Etat du gouvernement de Ouattara depuis 2016 !
Il est prié par son mentor de quitter ses fonctions de ministre de l’Intérieur et de la Sécurité pour prendre en main, le portefeuille de la Défense. Mission : mettre fin au désordre qui règne au sein de l’armée et rétablir la sécurité sur le territoire national. Si Hamed Bakayoko est la carte maîtresse d’Alassane Ouattara, c’est également sa dernière carte, car dans son entourage, il n’y a plus grand monde qui bénéficie autant de la confiance du Chef de l’Etat.
Il n’y a d’ailleurs plus assez de fidèles parmi les fidèles qui lui vouent une si grande loyauté comme le nouveau ministre de la Défense. Si ce dernier échoue, il est clair que Ouattara aura du fil à retordre, car il aura du mal à trouver un autre homme de si grande confiance pour lui confier la sécurité du pays.
Et pourtant, la situation sécuritaire depuis l’arrivée du Golden Boy à la défense nationale n’a rien de rassurant. Ce serait même une litote de dire qu’elle s’envenime. Car avant Hamed Bakayoko, on savait ceux qui troublaient la tranquillité des ivoiriens : hier les microbes en pole position, aujourd’hui les mutins et autres ex-combattants ! Depuis l’arrivée d’Hamed Bakayoko, des individus inconnus – mais très armés – sèment le désarroi dans le pays. Ils ont posé leur premier acte de guerre au soir de sa nomination à la défense en attaquant l’école de Police pour y prendre des armes.
Malgré les avertissements, les nouvelles dispositions prises par l’ancien ministre de l’Intérieur pour rétablir le calme, ces inconnus vont s’activer de nouveau en procédant à des attaques sur plusieurs brigades de Gendarmerie à l’intérieur du pays, s’échappant sans être inquiétés avec armes et souvent un bon pactole raclé des caisses des lieux attaqués. Successivement, ils s’en prendront à celles d’Azaguié, Fresco, Adzopé.
La tenue militaire arborée par Hamed Bakayoko – pur coup de communication – pour démontrer sa détermination à barrer le chemin de ces bandits sans scrupule, et surtout malgré le discours qui se voulait rassurant sur le dossier de la sécurité du Chef de l’Etat à l’occasion du 57ème anniversaire de l’indépendance de la Côte d’Ivoire, les fameux inconnus vont frapper de plus belle.
Et cette fois, avec une touche symbolique le lendemain de la fête nationale. Frapper en pleine mi-journée, au cœur du quartier des affaires du Plateau grouillant de monde, le siège du troisième pouvoir, le Palais de justice. Dans une démarche digne d’un scénario hollywoodien, les assaillants vont se permettre de faire évader des amis à eux qui devaient être jugés ce jour, occasionnant au total, l’évasion de 20 détenus. Ils s’en iront tranquillement sans être inquiétés d’aucune façon, molestant au passage un magistrat avant de lui prendre son véhicule. Cette fois, le Golden Boy a du surement sentir l’effet d’un coup de grâce sans pour autant baisser les bras.
Il se doit d’être solide car il est le dernier rempart d’Alassane Ouattara sur ce dossier encore plus brûlant que jamais de la sécurité. S’il se grille, l’horizon sera encore plus terne pour son mentor, qui doit coûte que coûte montrer aux ivoiriens qu’il est à la hauteur de diriger la Côte d’Ivoire en garantissant à ses concitoyen un minimum de sécurité. Il y va des intérêts économiques et de la stabilité de la Nation, mais surtout de la crédibilité du Chef de l’Etat, qui semble-t-il ne contrôle plus rien !
Après cette spectaculaire évasion, le ministre de la Défense a laissé le soin au Procureur de la république de répondre des faits sur les antennes de la télévision nationale. Il est surement au laboratoire en train de peaufiner la stratégie pour mettre le grappin sur ces fouteurs de troubles. Entre temps, les ivoiriens constatent avec amertume que les 20 évadés n’ont pas encore été retrouvés et leurs identités restent totalement méconnus, ainsi que ces assaillants qui sévissent depuis peu.
Alain P. Ahimou