Hier, c’est un ministre de la République qui faisait une déclaration dans l’enceinte de la cathédrale Saint Paul D’Abidjan pour désapprouver une déclaration faite antérieurement par l’archevêque D’Abidjan sur la situation sociopolitique du pays. Aujourd’hui, c’est le porte parole du gouvernement qui répond, en pleine séance de restitution d’un conseil des ministres, au contenu de l’homélie d’un prêtre sur l’état de la nation.
Ça se passe bien en Côte d’Ivoire, et de manière répétitive. J’aurais préféré que le porte parole du gouvernement se limite à dire qu’il n’a pas de réponse pour cet évêque et qu’il n’a pas à lui répondre. Mais sincèrement, je ne comprends ni la question du journaliste, ni la réponse du porte parole du gouvernement. Un évêque, c’est d’abord un citoyen avant d’être un pasteur, un ministre du culte et un leader d’opinion. Et il est libre de son opinion tant qu’il ne compromet pas les droits des tiers. De la même façon, ceux qui l’écoutent ne sont pas obligés de partager ce qu’il dit.
Ça s’appelle la liberté d’expression et d’opinion, comme cela est inscrit dans notre constitution. Qui plus est, les ministres du culte (Prêtres, Imams, pasteurs), ont aussi une fonction sociale éducative, une fonction de veille et d’alerte et de dénonciation des tares de la société, généralement du côté des moins nantis et des plus pauvres. Alors pourquoi le porte parole du gouvernement devrait-il répondre à un évêque sur son opinion et son homélie ? Le gouvernement n’a-t-il pas autre chose à faire que de répondre à chaque citoyen ou à chaque ministre du culte à chaque fois qu’il émettent des opinions contraires à ses vues? Le porte parole du gouvernement aurait-il répondu à l’évêque de Daloa si ce dernier avait dit des propos en soutien au gouvernement ?
Tout le monde n’est pas obligé de penser de la même manière, de voir du blanc ou du rouge sur commande, et de dresser un satisfécit là où il n’est pas convaincu. Et c’est bien cela le fondement de la démocratie. C’est bien dans des homélies et autres prédications que des ministres du culte ont par le passé appelé à la cessation d’actes d’exclusion injustifiés contre les tenants actuels du pouvoir en Côte Ivoire, vingt ans en arrière. Et pour assez structurée que les réponses du porte parole du gouvernement étaient sur l’homélie de l’évêque de Daloa, ça laisse subodorer que la question était suscitée et préparée pour apporter une réponse bien mesurée à l’évêque de Daloa sur son homélie.
En agissant de la sorte et de manière répétée, ça s’apparente en une manière de vouloir conditionner la pensée et l’opinion des ivoiriens dans un sens unique souhaité, de ne pas admettre la contradiction dans le débat sur les affaires publique. Et ça sous entend que nos gouvernants se refusent à l’exercice d’écoute de toutes les opinions, trop convaincus qu’ils sont d’être, dans l’absolu, dans le vrai et dans le meilleur des mondes. Qualifier de monde parallèle le ressenti d’un prêtre (sans doute ressenti de la même manière par d’autres milliers de citoyens ivoiriens), à notre sens, relève au moins de la maladresse et de la méconnaissance voulue du vécu réel de nombreux ivoiriens pour tout simplement refuser la contradiction.
Le monde de beaucoup d’ivoiriens, c’est celui des augmentations du prix du carburant, de l’augmentation annoncée des tarifs de l’électricité pour les 15amperes et plus, c’est le coût de la vie de plus en plus élevé et qui asphyxie les ivoiriens au quotidien. A défaut de partager cette manière de penser, on peut au moins la respecter et feindre d’en prendre acte. Si le dire ainsi, c’est vivre dans un monde parallèle, alors nos gouvernants sont dans un monde bien à eux, et les ivoiriens dans un autre. Et comment peut-on prétendre gouverner des gens avec qui on ne partage pas le même monde?
Au demeurant, un porte parole du gouvernement n’est censé parler que des actions et des décisions du gouvernement, pris en tant que machine de l’Etat pour l’intérêt général et le bien-être de la collectivité, mais pas de personnaliser l’action et les réalisations de l’Etat et d’opérer une confusion entre l’Etat et la personne qui le dirige. Il nous est apparu tout aussi maladroit que le porte parole du gouvernement personnalise et attribue l’action de l’Etat à la seule personne du Président de la République. Ainsi, en supposant même, que le Président de la République actuel ait construit les 5 autres universités du pays, il l’a fait es qualité et avec les fonds de la collectivité et non pas à titre purement personnel.
Le porte parole du gouvernement est porte parole du gouvernement, et non pas porte parole du Président de la République. Tout ce que nous demandons, c’est que les gouvernants écoutent, assurent que chacun a le droit de s’exprimer sur la façon dont la société est dirigée, et qu’ils essaient d’intégrer les critiques. Ici résident les fondements d’un Etat démocratique
Juste mon opinion, dans mon monde parallèle.
Libre pensée.
Eric-Aimé SEMIEN
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