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Agrobusiness : le Gouvernement en pompier ou pyromane ? (Opinion)

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S’il y a une affaire qui défraie la chronique actuellement en Côte d’ivoire, c’est bien évidemment celle de l’agrobusiness. Dans cette affaire, le gouvernement semble être à lui seul, l’orchestre et le chef d’orchestre. Le Gouvernement chante et danse au rythme de sa propre mélodie. Mais comment cette affaire a-t-elle commencé ?

L’Agro Gate a réellement débuté par la mise en garde des populations sur la nécessité de faire attention aux entreprises d’agrobusiness. Ensuite, bon nombre de dirigeants de ces entreprises ont été mis aux arrêts. Il s’en est suivi la saisie et le gel des comptes de ces sociétés.

Avant d’aller plus loin, il est important d’être clair sur une chose. J’ai du mal à cerner les tenants et les aboutissants de cette histoire. Mais j’essaierai de lever un coin de voile sur l’affaire en me basant sur le témoignage d’un ami avec qui j’avais eu à échanger sur la question. Pour lui, il s’agirait d’offres de fonds à des entreprises comme monhévéa.com, Agribiznet, Agro Finances, Agro Fin, Ivoire… Ces entreprises proposeraient aux souscripteurs des plans d’investissement agricoles, notamment dans le domaine des cultures vivrières.

Le souscripteur, par l’intermédiaire de l’entreprise d’agrobusiness investit de l’argent sur une parcelle de terre, existant normalement quelque part dans le pays, pour y faire de la culture. Et une fois la récolte effectuée et les produits vendus, dans un délai de six mois, le souscripteur reçoit un retour sur investissement avec un bénéfice pouvant avoisiner les 400% de la somme investie. Alléchant comme offre, n’est-ce pas ? Ne voulant pas me lancé dans une affaire aux contours que je qualifie louches (pour ne pas dire trop facile), je me suis abstenu de souscrire. J’ai d’ailleurs dit à mon ami « Atia, votre affaire de agrobusiness là, je n’y comprends rien. Ça me fait penser à de la loterie ’’rouge perd noir gagne’’. Donc mes 5F ne vont pas aller là-bas ». C’est trop facile ça !

Cette discussion avec mon ami date d’au moins 1 an, pourtant, après quelques recherches, j’apprends que l’affaire existe depuis 8 voire 9 ans. Si j’ai bien compris, depuis 2008, cette affaire d’agrobusiness existe !? Après cette révélation, je l’avoue, mon petit cerveau habitué à la facilité n’arrive pourtant pas à comprendre certaines choses. Je m’interroge. Comment se fait-il qu’une entreprise qui est aujourd’hui traité de tous les noms ait pu exercer depuis toutes ces années sans être inquiétée ? Pour ma part, je n’accuse pas les entreprises d’agrobusiness. J’accuse ici et maintenant, en premier lieu l’Etat de Côte d’ivoire qui a pour garant moral le gouvernement. J’estime qu’il a failli à sa mission, celle de veiller sur le bien être des personnes et de leurs biens.

Si tant est que Christophe Yapi est fiché comme « escroc », comment a-t-il pu « abuser » en toute légalité et légitimité des Ivoiriens que nous sommes pendant 10 ans ? J’accuse également les responsables des différentes banques partenaires… enfin, ex-partenaires, puisqu’elles se défilent aujourd’hui. Étant des financiers, elles auraient dû avertir les autorités sur le délit d’initiés qui se préparait sur la tête des ivoiriens. Elles ont crédibilisé l’arnaque, elles ont avalisé la forfaiture. Vous vous en êtes mis plein les poches. Et voyant le « mal » venir, vous décidez de vous en lavez les mains, en sacrifiant plus 36.000 Ivoiriens sur l’autel de votre gloire personnelle.

Par ailleurs, une ou plutôt deux questions restent toujours sans réponse : Qu’est-ce qui a déclenché l’intérêt (soudain) du gouvernement pour ce business ? Est-ce que l’une des sociétés a manqué, ne serait-ce qu’une fois, de payer les RSI de ses souscripteurs ? Tout le monde parle d’arnaque sans que celle-ci ait réellement eu lieu. On dira que ça allait forcément arriver un jour. Mais bon, en presque 10 ans, y’a-t-il un seul souscripteur qui est allé se plaindre auprès d’une juridiction estimant n’avoir pas reçu son argent ? La question est peut-être bête…mais, je me la pose quand même. Parce que cautionner quelque chose pendant 8 ans, venir dire aujourd’hui que cette chose n’est pas légale et vouloir s’en laver les mains est pour moi d’une facilité déconcertante.

Et dernière décision du gouvernement : la mise en place d’un comité de veille pour le remboursement du capital des souscripteurs. Pourtant, toutes les sociétés crient à tue-tête être capables de respecter leurs engagements de paiement des RSI. À la lumière de tout ce flou, je me demande si on peut encore faire confiance au Gouvernement et autres institutions qui s’intéressent aussi soudainement au mal (présumé) que représente l’agrobusiness.

Wilfried Zigré

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