L'actualité ivoirienne sans coloration politique

Comment Eburnie Today pratique le fact-checking ?

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La pratique du fact-checking se développe de plus en plus dans la sphère francophone du journalisme. En Côte d’Ivoire, le site d’information en ligne Eburnie Today le pratique depuis sa création en 2016. Sans avoir la prétention de réinventer cette nouvelle tendance du journalisme moderne, notre rédaction a tout de même développé sa propre manière de concevoir et de pratiquer le fact-checking.

Le terme anglais fact-checking, littéralement « vérification des faits », désigne un mode de traitement journalistique, consistant à vérifier de manière systématique des affirmations de responsables politiques ou des éléments du débat public. L’information déjà publiée est donc celle qui fait l’objet d’une vérification.

Cette information fausse, manipulée ou tout simplement créée pour des raisons de propagande politique ou autre peut se retrouver partout et surtout sur les réseaux sociaux. C’est justement dans ce nouvel espace virtuel de dialogue, d’interconnexion, de partage et de diffusion de l’information que Eburnie Today va traquer la fausse information. Elle peut prendre plusieurs formes ou aspect en fonction de l’intention maligne de celui qui la crée ou la partage.

La typologie de la fausse information la plus courante dans le contexte ivoirien est la désinformation. On peut la définir comme la création intentionnelle et le partage délibérée d’une information reconnue comme étant fausses afin de duper une ou plusieurs personnes. Ces informations sous forme d’image ou de vidéo sorties de leur contexte ont pour but d’influencer et de manipuler de l’opinion.

De nombreuses fausses informations circulent sur les réseaux sociaux

La mésinformation (traduit de l’anglais misinformation) est le partage involontaire de fausses informations erronées ou obsolètes par erreur, par manque de vigilance, de rigueur et de connaissance sur le sujet. Nous notons à Eburnie Today qu’il s’agit d’une erreur généralement commise par des utilisateurs très peu réguliers des réseaux sociaux, le groupe d’individus se connectant rarement ou occasionnellement pour une durée très courte à internet.

La décontextualisation est aussi une pratique en vogue en Côte d’Ivoire. Elle est surtout pratiquée par des pages, groupes ou individus proches des chapelles politique. Une image ou une vidéo réelle est publiée avec une information réécrite n’ayant aucun lien avec la source iconographique mais intentionnellement présentée comme telle. Les parodies et informations satiriques sont des figures de style et de communication bien connues. Il est vrai que les Ivoiriens aiment rire de tout mais attention : si le ton et la formulation ne sont pas directement évocateur ou perceptibles au premier contact, cette information fabriquée de toute pièce pour faire rire peut-être prise au sérieux et relayée.

Le clickbait est aussi une pratique historique en Côte d’Ivoire et largement développé par la presse papier sous l’appellation ironique de « titres bandants ». Ces gros titres qui annoncent des contenus creux ou n’ayant aucun lien avec le contenu sont accrocheurs. Si traditionnellement ils sont faits pour vendre, ils sont aujourd’hui délibérément trompeurs et associés à des faits inventés ou déformés juste pour attirer les lecteurs, créer le buzz, faire des vues ou générer des commentaires.

Comment déconstruire la fausse information ?

A Eburnie Today, nous avons remarqué que l’essentielle des fausses informations relayées sont en lien avec l’actualité, notamment l’actualité politique. Par exemple, la volonté de survendre le bilan économique du gouvernement ivoirien a poussé des officiels à sortir des chiffres qui ne sont nullement fondés. Des photos de grands travaux (ponts et routes) en Afrique du Sud et au Nigéria ont été détournées pour les faire passer pour des chantiers en réalisation en Côte d’Ivoire. Face à cette désinformation, la rédaction a développée trois genres de fact-checking.

Le quick-check ou fact-checking rapide (quick rapide en anglais) : il s’agit généralement de fausses informations assez rapide à déconstruire. Eburnie Today qualifie de fact-checking rapide, une fausse information déconstruite en moins de 60 minutes chrono. C’est la technique utilisée pour l’article « Le discours d’adresse à la Nation de Ouattara a-t-il été diffusé avant l’heure ? ». L’essentielle des recherches ont été réalisées sur les réseaux sociaux grâce à des indices laissés sans le savoir par ceux qui ont tenté de manipuler l’opinion.

Investigative-check : c’est une fusion entre le fact-checking et le journalisme d’investigation par hypothèse pour vérifier des affirmations de responsables politiques ou des éléments du débat public. C’est la technique utilisée pour l’article « L’Etat ivoirien spolie 11.000 hectares de terre à Famienkro ». Le journaliste a mené son travail de vérification de l’information (une décision de justice + les affirmations d’un ministre) grâce à des éléments de preuve qui n’étaient pas rendus public. Il a donc fallu avoir recours aux bonnes vielles techniques du journalisme d’investigation pour dénicher des documents afin de construire l’article en trois articulations : l’historique du litige et la nature du droit applicable sur le foncier, l’intervention de l’administration et la décision de justice et pour finir, les limites de la décision de justice et le caractère infondé de la position du ministre de l’agriculture.

Data-check : est une fusion entre le fact-checking et le journalisme de données (date journalism). A Eburnie Today, nous estimons que la donnée est la matière première du journalisme. Nous ne voyons donc par le journalisme de données comme un genre (isolé) mais plutôt comme un genre transversal indispensable aux autres genres journalistiques. Déconstruire une fausse information grâce au data-check est assez passionnant car faisant appel à d’autres technique comme la création de graphismes ou de visuels qui facilitent la lecture et la compréhension de l’article. C’est la technique utilisée pour l’article « Non, le barrage de Soubré n’est pas le plus grand de l’Afrique de l’ouest ». L’article est basé sur des données extraits de rapports ou de documents en open source qui rendent plus facile la comparaison entre le barrage de Soubré et d’autres barrages importants en Afrique de l’ouest. Le data-check est très avantageux pour les affirmations ou documents contenant des chiffres.

Ces trois formats du fact-checking pratiqués par Eburnie Today peuvent exister sous d’autres appellations dans les rédactions et médias qui se consacrent au fact-checking. L’essentiel, c’est qu’au-delà du nom, ces formats puissent continuer d’aider les journalistes à déconstruire les fausses informations.

Suy Kahofi, Traoré Bakary & Anderson Diédri

Les approches définitionnelles du présent article ont été construites sur la base de ressources disponibles sur les sites de référence suivants :

www.afp.com

www.liberation.fr/desintox

www.lemonde.fr/les-decodeurs

www.factcheck.org

www.arretsurimages.net

www.clemi.fr

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