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Qualité des routes : les péages comme solution ?

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Plus de péages équivaut à plus de ressources dans les caisses de l’Etat pour entretenir les routes et en construire de nouvelles. C’est la clé, estiment les autorités, pour des routes de qualité. Et partant, la baisse du coût de la vie.

« Nous sommes conscientes du fait que ce n’est pas bien : mais quand nous allons en brousse, il y a un seul camion pour transporter la marchandise de plusieurs femmes. C’est pourquoi nous sommes obligées de faire du surcharge ».

C’est ainsi Rosalie Aman, commerçante et présidente du conseil d’administration du marché Penuel d’Abobo, se justifie face aux critiques.

En effet, les commerçantes de vivriers sont accusées de dépasser trop souvent les poids autorisés pour les camions lors de transport de marchandises des campagnes vers les centres urbains. Selon les spécialistes, « le surcharge des véhicules de marchandises au-delà de 13 tonnes à l’essieu » constitue l’une des 10 principales causes de la dégradation des routes.

Des surcharges dommageables

Mais ces femmes en subissent directement les conséquences. Joséphine Zahi, également commerçante au marché d’Abobo, se souvient d’une situation terrible qu’elle a vécue : « le camion était tellement chargé que le véhicule a eu une panne lors du trajet. Le moteur a pris un coup et le pneu a crevé ».

Si elles en sont les premières victimes, l’état des routes est aussi un facteur de la cherté du coût de la vie : « Le temps de faire tous ces travaux, j’ai perdu une bonne partie de la banane. Une fois à Abidjan, je suis obligée de vendre cher mes produits pour rentrer dans mes fonds parce que personne ne va me rembourser ».

Pour minimiser le transport des produits alimentaires vers les métropoles et en même temps rentabiliser leurs investissements, ces femmes du vivier sont parfois obligées de s’associer à trois ou à quatre pour la location d’un véhicule de dix tonnes. Et cela conduit aux surpoids. Mais en plus des coûts élevés de location de camion qui atteignent 500 000 francs Cfa pour « une petite distance », l’accès difficiles à certaines localités du pays, la dégradation de certaines voies et l’absence par endroits de routes bitumées font que les transporteurs refusent de mettre à disposition leurs gros camions pour aller récupérer leurs produits.

Ces commerçantes ne demandent qu’une chose :

« si l’Etat mettait des camions à la disposition des femmes, et à des endroits stratégiques, on pourrait les louer à moindre coût et certainement qu’on ne ferait pas de surcharge ».

Autoroutes : la Côte d’Ivoire à la traine

La route précède le développement. Toutefois, il est important de prendre soins des routes afin qu’elles aient une longue durée de vie. Ce qui n’est toujours pas le cas. A l’occasion de la journée internationale des droits des consommateurs célébrée ce jeudi 15 mars 2018, la Fédération ivoirienne des consommateurs « Le Réveil » a organisé une rencontre à l’auditorium de la bibliothèque nationale d’Abidjan-Plateau pour relancer le débat sur la réhabilitation et la construction des infrastructures routières en Côte d’Ivoire.

En la matière, l’exemple du Maroc est édifiant. Venu en 1992 s’inspirer de l’expérience ivoirienne en matière de construction d’autoroutes, le royaume chérifien est aujourd’hui cité en modèle. A l’époque, la Cote d’Ivoire n’avait que 145 km d’autoroute qui partait d’Abidjan à Singrobo. Alors qu’aujourd’hui, le Maroc détient plus de 2000 km d’autoroute, la Cote d’Ivoire n’en a que 250 km.

Soit 105 km construit en 26 ans. Soumahoro Ben N’Fally, président de la Fédération ivoirienne des consommateurs « Le Réveil », interroge le ministre des infrastructures économiques sur la stratégie à mettre en place pour rattraper ce retard : « monsieur le ministre, comment faire pour dépasser le Maroc ? ».

L’option du péage 

« La vérité c’est que nous ivoiriens n’avions pas voulu appliquer ce que les autres font », répond Amedé kouakou Koffi, ministre des infrastructures économiques, en faisant référence aux péages sur les routes. Si des pays comme le Ghana et le Maroc ont des routes très praticables, explique-t-il, c’est parce qu’ils ont accepté le système de péage : « c’est ça la clé : il n’y a pas d’autres secrets ».

Un km de voie bitumée revient en moyenne à 500 millions de francs Cfa à l’Etat ivoirien. A ce jour, le premier producteur mondial de cacao dispose de 6 500 km de routes bitumées dont 4 500 km réalisées depuis plus de 18 ans. Auxquelles il faut ajouter 750 000 km de pistes. Pour 2018, c’est 40 000 km qui seront réhabilitées, soit 1000 km dans chaque région.

Les trois prochaines années, la Côte d’Ivoire envisage de réaliser 100 km d’autoroute. Mais s’il y a des péages, observe Amedé Kouakou, cela pourrait permettre de développer 300, 400, voire 500 km :

« Quand vous passez sur une route, vous payez quelque chose. Dans la mesure où vous payez quelque chose pour passer, celui qui s’occupe de la route, c’est-à-dire l’Etat, à obligation d’entretenir la route ».

Pour le ministre, l’option revient aux usagers : vouloir des routes praticables ou pas.

Raïssa Yao

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