VIH-SIDA : levons la main pour plus de prévention
Le monde a célébré ce 1er décembre la 29ème journée mondiale de lutte contre le SIDA autour du thème : levons la main pour la prévention du VIH-SIDA. Un thème qui rappelle l’urgence du dépistage pour ne pas vivre dans l’ignorance.
L’OMS estime qu’aujourd’hui que 40% des personnes porteuses du VIH (plus de 14 millions) ne connaissent pas leur statut sérologique. Cette situation a d’importantes conséquences sur leur propre santé et celle de leur entourage (famille et partenaires sexuels). En effet vivre dans l’ignorance, c’est courir le risque de développer la maladie voir d’en mourir là où l’on aurait pu avoir accès gratuitement à des soins de santé (ARV). Cependant plusieurs facteurs peuvent expliquer cette réticence face au dépistage. Quelques ivoiriens interrogés dans les rues d’Abidjan, la capitale économique ivoirienne, indiquent que l’une des raisons fondamentales qui poussent de nombreuses personnes à vivre dans l’ignorance reste la stigmatisation.
« Connaître son statut sérologique c’est bien mais le problème c’est d’avoir la force de surmonter cette épreuve. Le fait de savoir qu’on est séropositif peut vous faire sombrer dans la dépression parce que pour beaucoup le SIDA reste une fatalité. Même partager son statut avec les autres en espérant avoir du soutien peut produire le résultat contraire. Votre entourage peut vous rejeter » nous explique Kouassi Ulrich un jeune cadre du privé.
Au-delà de la stigmatisation, la crainte de ne pas avoir accès aux ARV reste une problématique majeure. Le récent rapport de l’OMS sur la situation du VIH-SIDA dans le monde souligne que « plus de 18 millions de séropositifs pour le VIH sont actuellement sous TAR (traitement anti rétroviral) et qu’un nombre équivalent ne peut toujours pas avoir accès au traitement, une majorité d’entre eux ignorant leur statut vis-à-vis du VIH ». L’absence de traitement accentue une certaine crainte vis-à-vis du dépistage en accentuant l’idée d’une mort programmée pour celui qui se sait séropositif.
Bien que la volonté reste affichée, force est constater que le dépistage reste un luxe pour certains groupes cibles. Les travailleurs et travailleuses du sexe, les jeunes filles en âge de procréer, les transgenres, les personnes qui s’injectent des drogues et les prisonniers qui représentent environ 44% des 1,9 million de nouvelles infections par le VIH chez l’adulte survenant chaque année.
L’une des solutions pour vulgariser le dépistage du VIH-SIDA et ainsi protéger un nombre important de personnes est l’auto-dépistage. L’auto dépistage permettrait à de nombreuses personnes non seulement de connaître leur statut, mais aussi de savoir comment obtenir un traitement et d’accéder aux services de prévention. Gregory Härtl, Coordonnateur des médias au département communication de l’OMS explique le principe de l’auto-dépistage.
Le dépistage et les ARV disponibles et gratuits
Avec un taux de prévalence estimé à 3,7% et une tendance à la baisse au niveau des nouvelles infections en 2016, la Côte d’Ivoire a très vite compris que la gratuité du dépistage et du TAR sont les clés pour réduire la propagation de la maladie. Le traitement contre le VIH est disponible en Côte d’Ivoire pour tous. De la femme enceinte à l’adulte en passant par le traitement pédiatrique pour les enfants, chaque personne touchée par le VIH peut avoir accès à des soins gratuits indique Docteur Abo Kouamé coordonnateur du programme national de lutte contre le SIDA.
Bien que la Côte d’Ivoire dispose de stock d’ARV, le pays est crédité d’une couverture nationale de 47%. Ce taux est encore faible et il faut des efforts pour aller plus loin dans les efforts de prise en charge des malades. En termes de couverte PTME (prévention de la transmission mère enfant), le taux est toujours inférieur à 50%. Trois raisons peuvent expliquer en grande partie cette situation : le taux d’abandon des malades, la stigmatisation et le manque d’information. Concernant ce dernier point, il faut comprendre clairement que le SIDA, bien qu’étant une maladie très médiatisée, de nombreuses personnes n’ont pas encore accès à l’information sur la maladie et surtout les politiques de prise en charge.
L’accès à l’information reste difficile pour les populations rurales or c’est dans ce milieu (majoritairement analphabète) que les préjugés sur le SIDA sont difficiles à combattre. Quand les centres de santé ne sont pas éloignés, le personnel local accorde très peu de place aux questions liées au SIDA parce que préoccupé par des problèmes quotidiens comme le paludisme ou la malnutrition infantile.
Le taux d’abandon s’explique quant à lui par le fait que de nombreux malades après le dépistage et souvent même le début de la prise des ARV ne reviennent plus vers les structures sanitaires. Ils ne suivent plus le traitement et courent le risque de développer la maladie ou d’infecter d’autres personnes. Pire leur attitude prive d’autres malades de l’accès aux médicaments. Et si le taux d’abandon et le manque d’information était liés à la stigmatisation ? Comment s’informer en toute discrétion sur la maladie sans courir le risque d’être toisé de « sidéen » à l’école ou dans le quartier ? Comment rallier le centre de santé pour récupérer ma dose mensuelle ou trimestrielle d’ARV sans susciter la méfiance de mes collègues ou de mes amis sur le campus ? Autant de questions qui éloignent de nombreux ivoiriens des centres de dépistage.
SUY Kahofi
Note de la rédaction : au cours du mois de décembre, Eburnie Today proposera à ses lecteurs une série d’articles sur la prévention contre le VIH-SIDA. Un mois d’activisme pour parler d’une pandémie qui reste hélas d’actualité.